Planck dévoile une nouvelle image du Big Bang
Lancé en 2009, Planck, le satellite de l’Agence spatiale européenne
(ESA) dédié à l’étude du rayonnement fossile, livre aujourd’hui les
résultats de ses quinze premiers mois d’observations. Ils apportent une
moisson de renseignements sur l’histoire et la composition de l’Univers
: la carte la plus précise jamais obtenue du rayonnement fossile, la
mise en évidence d’un effet prévu par les modèles d’Inflation, une
révision à la baisse du rythme de l’expansion de l’Univers, ou encore
une nouvelle évaluation de la composition de l’Univers. Bon nombre de
ces données ont été obtenues grâce au principal instrument de Planck,
HFI, conçu et assemblé sous la direction de l’Institut d’astrophysique
spatiale (CNRS/Université Paris-Sud) avec un financement du CNES et du
CNRS. Depuis sa découverte en 1965, le rayonnement fossile
constitue une source de connaissance précieuse pour les cosmologistes,
véritable « Pierre de Rosette » permettant de décrypter l’histoire de
l’Univers depuis le Big Bang. Ce flux de photons détectable sur
l’ensemble du ciel, dans la gamme des ondes radio, témoigne de l’état
de l’Univers lors de sa prime jeunesse et recèle les traces des grandes
structures qui se développeront par la suite. Produit 380 000 ans après
le Big Bang, au moment où se formèrent les premiers atomes, il nous
arrive quasi inchangé et permet aux scientifiques d’accéder à l’image de
ce que fut le cosmos à sa naissance, voici environ 13.8 milliards
d’années. Confronter ces mesures aux modèles théoriques peut nous
apporter de multiples informations : non seulement sur l’évolution de
l’Univers depuis l’apparition du rayonnement fossile, mais également sur
des événements antérieurs qui en sont la cause et pour lesquels les
astrophysiciens disposent de peu d’observations.
© ESA - Collaboration Planck
Carte de la température du rayonnement fossile sur tout le ciel réalisée
par la collaboration Planck à partir des données recueillies par les
instruments HFI et LFI du satellite. L’échelle de couleur est en
millionièmes de degré : c’est l’écart par rapport à la température
moyenne de -270.425
℃
mesurée par le satellite COBE en 1992. Une nouvelle carte du rayonnement fossile
C’est l’une de ces fenêtres sur l’Univers primordial
que vient d’ouvrir la mission Planck. Lancé en 2009, ce satellite de
l’ESA a, durant un an et demi, dressé une carte de ce rayonnement
fossile sur l’ensemble du ciel. Planck possède deux instruments dont
l’un, l’Instrument haute fréquence HFI, a été conçu et assemblé sous la
direction de l’Institut d’Astrophysique Spatiale (CNRS/Université
Paris-Sud) avec un financement du CNES et du CNRS. Grâce à eux, il a pu
mesurer avec une sensibilité sans précédent les variations d’intensité
lumineuse de l’Univers primordial, venant affiner les observations des
missions spatiales COBE (lancée en 1990) et WMAP (en 1998). Ces
variations d’intensité lumineuse (qui se présentent sous la forme de
taches plus ou moins brillantes) sont précisément l’empreinte des germes
des grandes structures actuelles du cosmos et désignent les endroits où
la matière s’est par la suite assemblée, puis effondrée sur elle-même,
avant de donner naissance aux étoiles, galaxies et amas de galaxies. Selon certaines théories, l’origine de ces « grumeaux
» ou « fluctuations » du rayonnement fossile est à chercher du côté de
l’ « Inflation », un évènement survenu plus tôt dans l’histoire de
l’Univers. Durant cet épisode, très violent, qui se serait déroulé
environ 10-35 secondes après le « Big Bang », l’Univers aurait connu une
brusque phase d’expansion et aurait grossi de manière considérable, au
moins d’un facteur 1026. Planck a permis de démontrer la validité de
l’une des prédictions essentielles des théories d’Inflation :
l’intensité lumineuse des « fluctuations à grande échelle » doit être
légèrement supérieure à celle des « fluctuations à petite échelle ». En
revanche, pour les plus grandes échelles, l’intensité observée est
inférieure de 10% aux prédictions de l’Inflation, un mystère qu’aucune
théorie ne parvient à expliquer aujourd’hui. Planck confirme par
ailleurs avec certitude l’existence d’autres anomalies observées par le
passé comme une mystérieuse asymétrie des températures moyennes
observées dans des directions opposées ou l’existence d’un point froid. Parmi ces autres résultats :
·
La confirmation de la « platitude » de l’Univers
·
La révision à la baisse de la constante de Hubble, et donc du rythme
d’expansion de l’Univers
·
Une nouvelle évaluation, à partir du seul rayonnement fossile, de la
composition de l’Univers : 69.4 % d’énergie noire (contre 72.8 %
auparavant), 25.8 % de matière noire (contre 23 %) et 4.8 % de matière
ordinaire (contre 4.3 %).
·
Des cartes inédites précieuses pour affiner le scénario de l’histoire de
l’Univers et comprendre la physique qui régit son évolution : elles
permettent de montrer comment se répartissent la matière noire et la
matière ordinaire sur la voûte céleste ; le « fond diffus infrarouge »
correspond quant à lui à la lumière émise par les poussières de toutes
les galaxies au cours des dix derniers milliards d’années et permet donc
d’identifier les zones où se sont concentrés les objets constitués de
matière ordinaire.
·
Une première analyse de la polarisation du signal cosmologique, qui
montre que les données de Planck sont remarquablement cohérentes avec
celles sur l’intensité du rayonnement fossile aux échelles
correspondantes aux futurs amas de galaxies ; une analyse plus complète
sera fournie en 2014, ainsi que d’autres résultats de la mission Planck. La France est leader de l’instrument haute fréquence
Planck-HFI, essentiel pour les résultats cosmologiques : sa construction
a coûté 140 millions d’euros et mobilisé 80 chercheurs de dix
laboratoires du CNRS, du CEA et d’universités, ainsi que de nombreux
ingénieurs et techniciens. La France a assuré plus de 50% du financement
de cette construction ainsi que celui du traitement de ses données : ce
financement provient pour moitié du CNES, pour moitié du CNRS et des
universités. Elle participe également au financement de la mission
elle-même via sa contribution financière au programme scientifique de
l’ESA, soit 15% du coût de la mission.
·
APC, AstroParticule et Cosmologie (Université Paris Diderot-Paris 7,
CNRS, CEA, Observatoire de Paris), à Paris : développement de moyens de
tests.
·
IAP, Institut d’Astrophysique de Paris (CNRS, UPMC), à Paris :
développement des objectifs scientifiques et conception du traitement
des données.
·
IAS, Institut d’Astrophysique Spatiale (Université Paris-Sud, CNRS), à
Orsay : conception initiale et responsabilité scientifique et technique
de l’instrument.
·
Institut Néel (CNRS), à Grenoble : développement de la cryogénie à 0,1
K.
·
IPAG, Institut de Planétologie et d’Astrophysique de l’Observatoire des
Sciences de l’Univers de Grenoble (CNRS, Université Joseph Fourier
Grenoble 1), à Grenoble : modélisation de l’instrument.
·
IRAP, Institut de Recherche en Astrophysique et Planétologie de
l’Observatoire Midi-Pyrénées (Université Paul Sabatier Toulouse III,
CNRS), à Toulouse : développement de l’électronique des détecteurs.
·
CEA-IRFU, Institut de Recherche sur les Lois Fondamentales de l’Univers
du CEA, à Saclay : études de compatibilité électromagnétique.
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